deutsch : am Ende
Olivier Greif (1950-2000) fut le premier à qui, toute jeune, j’osai en 1978 montrer quelques-uns de mes essais. J’étais totalement conquise par lui depuis qu’il m’avait joué le finale de sa sonate pour piano et qu’il avait déchiffré au clavier le cinquième quatuor de Bartók (dans un tempo trop rapide malgré l’extrême complexité de la lecture… ce qui n’étonnera pas ceux qui l’ont connu), quatuor que je vénérais mais qu’à mon étonnement il ne connaissait pas ! Je devins alors son élève – d’ailleurs la seule qu’il ait eu de façon suivie, d’après ce qu’il me déclara à Radio-France, où l’une de mes œuvres était créée, en février 2000.
Il se moqua presque des pièces pour piano que je lui montrai au début et j’en fus assez mortifiée. Elles étaient en effet assez insignifiantes. Puis il déclara mon « Triptyque » pour flûte d’œuvre « parfaite et inspirée » et la fit programmer. Son éditeur la vend toujours bien : ce qui m’a toujours impressionné chez Olivier, entre autres, c’est la sûreté de son jugement sur le succès que pourra connaître une musique.
La première chose qui frappait chez lui était l’énergie incroyable de son jeu au piano ; une énergie très profonde, qui vient de loin : c’est elle, sous son aspect brut, dont est chargé le premier mouvement de mon Tombeau, presque exclusivement confié au piano, l’instrument d’Olivier.
Ce premier mouvement représente aussi pour moi sa solitude, alors que, un peu comme Beethoven peut-être, il était pourtant au centre de nombreux cercles de connaissances et d’amis, mais qui avaient la curieuse propriété de s’ignorer.
Après avoir conquis le monde musical très jeune et de façon irrésistible, ses tourments et ses recherches spirituelles – du moins est-ce ma vision des choses – le mirent en porte-à-faux avec la société ; après une retraite volontaire de dix années, il revint à la musique et continua à développer son art pour le mener vers une sorte d’apogée, divin selon les uns, insupportable pour les autres. Et en effet, on peut penser que ce maelström qu’est toute la musique d’Olivier, plutôt – ou en même temps – qu’une ascension, révèle une plongée irréversible dans l’abîme, une sorte de trou noir dévorant qui s’affaisse sur lui-même dans une accélération vers la catastrophe; d’où, à la fin du second mouvement, la mort prématurée du piano (symbolisant celle d’Olivier en 2000, à 50 ans) – obligeant Claire Désert [la créatrice] à se passer de clavier pour continuer !
D’où aussi ce besoin, pour moi qui ne suis pourtant pas croyante, à l’inverse d’Olivier, de lui offrir ensuite un troisième et dernier mouvement comme apaisé par la mort; c’est le violoncelle, un instrument qui l’attirait tout particulièrement, qui mène ici le discours dans une sorte d’antigravité qu’il recherchait, me semble-t-il, désespérément…
(Grabmal für Olivier Greif)
Dem Kandinsky-Quartett gewidmet
Claire Désert : Klavier, Philippe Aïche : Geige, Nicolas Bône : Bratsche, Nadine Pierre : Cello
Auftragswerk des Theaters Chatelet, Paris, Direktion Jean-Pierre Brossmann
Uraufführung : Paris, Théâtre du Châtelet, 5. April 2002.
Aufzeichnungen der Uraufführung durch Mezzo und Radio-France (2002)
Dauer : 10-11′
Olivier Greif (1950 – 2000) war der erste, dem ich 1978 einige meiner Kompositionsentwürfe zu zeigen wagte. Ich war völlig von ihm begeistert, nachdem er mir das Finale seiner Klaviersonate vorgespielt hatte sowie am Klavier das fünfte Streichquartett von Bartok vom Blatt spielte (in einem zu raschen Tempo trotz der extremen Komplexität der Partitur…was diejenigen, die ihn kannten, nicht weiter verwundern wird), das ich sehr schätzte, ihm aber unbekannt war ! Ich wurde also seine Schülerin, übrigens die einzige, die er regelmässig unterrichtet hat.
Er machte sich fast lustig über die Klavierstücke, die ich ihm anfangs zeigte, was mich schwer erschütterte. Dann befand er, dass mein Werk « Tryptique » für Flöte « perfekt und voller Eingebung » sei und sorgte für seine Aufführung. Der Verlag Billaudot verkauft dieses Werk gut: was mich immer bei Olivier beeindruckt hat, unter anderem, ist die Sicherheit, mit der er den Erfolg eines musikalischen Werkes voraussagte.
Das erste, was bei ihm auffiel, war die unglaubliche Energie seines Klavierspiels; eine sehr tiefe Energie, die von weit herkommt : sie ist es, in ihrem rohen Anteil, die den ersten Satz meines « Grabmals » auflädt, der fast ausschließlich dem Klavier anvertraut ist, Oliviers Instrument.
Dieser erste Satz bringt für mich auch seine Einsamkeit zum Ausdruck, obwohl er, ein wenig wie Beethoven vielleicht, im Mittelpunkt zahlreicher Bekannten- und Freundeskreise stand, wobei diese sich kuriöser Weise untereinander nicht kannten.
Nachdem er die Welt der Musik sehr jung und auf unwiderstehliche Weise erobert hatte, führten ihn seine inneren Qualen und seine spirituelle Suche – zumindest ist dies meine Sicht der Dinge – in Widerspruch mit der Gesellschaft ; nach einem selbstgewählten Rückzug von zehnjähriger Dauer kam er zur Musik zurück und entwickelte seine Kunst immer weiter auf eine Art Höhepunkt zu, göttlich für die einen, unerträglich für die anderen. Und man kann in der Tat denken, dass dieser Malstrom, der Oliviers Musik ausmacht, weniger eine Himmelfahrt (oder gleichzeitig mit einer solchen ?) als vielmehr einen unwiderruflicher Kopfsprung in den Abgrund darstellt, eine Art schwarzes verschlingendes Loch, das in sich selbst zusammenbricht in einer Beschleuinigung auf die Katastrophe zu; woher sich denn auch am Ende des zweiten Satzes der vorzeitige Tod des Klaviers ergibt, der den/die PianistIn dazu zwingt, ohne die Tastatur weiterzuspielen !
Woher denn auch dieses Bedürfnis bei mir entsteht, obwohl ich im Gegensatz zu Olivier nicht gläubig bin, ihm diesen dritten und letzten Satz, wie erlöst durch den Tod, zu schenken; das Cello, Instrument, zu dem er sich besonders hingezogen fühlte, führt hier den Diskurs in eine Art Gegenschwerkraft, nach der er, wie mir scheint, verzweifelt suchte…
(IBB 2002, 2020) Übersetzung : Anja Thomas